Les Troubles Respiratoires Obstructifs du Sommeil (TROS) de l’enfant

La symptomatologie du TROS de l’enfant diffère notablement de celle de l’adulte. Mais l’association de plusieurs symptômes et d’éléments de l’examen clinique permet de suspecter aisément le diagnostic. 

Ce tableau clinique évocateur peut être incomplet et varier d’un patient à l’autre. Ainsi, classiquement l’enfant a fréquemment le nez obstrué chroniquement, la bouche entrouverte la nuit et même dans la journée et les incisives tendent à se déplacer vers l’avant. L’enfant a parfois une voix nasonnée ou rauque et une mauvaise haleine le matin. Il est souvent allergique, et présente fréquemment une rhinite chronique et peut être victime du tabagisme passif ou tertiaire (fumées sur les vêtements et les cheveux). L’enfant a souvent les yeux cernés. Il n’est pas rare qu’ils soient allés chez l’orthodontiste, l’orthophoniste, le psychologue voire même le pédopsychiatre. En effet, dans la journée l’enfant peut être agité et inattentif au caractère opposant. Dans les formes sévères, il peut présenter un comportement agressif. C’est pour ces symptômes comportementaux que ces enfants sont souvent adressés en premier lieu en psychiatrie et ce, bien avant de pourvoir bénéficier d’un dépistage de TROS. La situation actuelle est que la majorité d’en eux n’en bénéficie jamais même si les parents rapportent des troubles du sommeil. Les médecins considèrent que les troubles du sommeil sont des symptômes du Syndrome d’Hyperactivité et de déficit d’Attention.

Hyperactivité

Avant l’adolescence, ces enfants sont souvent hyperactifs ; ils ne cessent de bouger, de se tortiller et ne tiennent pas en place. Il faut savoir que l’hyperactivité de l’enfant est l’équivalent de l’hypersomnolence de l’adulte et évoque presque toujours une perturbation profonde du sommeil.  Cette hyperactivité a tendance à agacer l’entourage et les parents. Les enfants sont alors l’objet de récriminations et de brimades d’autant que les parents peuvent être eux-mêmes fatigués et facilement irritables surtout s’ils présentent eux-mêmes des troubles du sommeil.

Inattention

Cette hyperactivité est très souvent accompagnée de trouble d’attention pouvant réaliser un véritable syndrome du Trouble de Déficit d’Attention avec Hyperactivité (TDAH). Ils ont beaucoup de mal à se concentrer sur le travail scolaire ou sur leur lecture. L’enfant présente une grande distractibilité et exprime une grande difficulté à se concentrer même lors de ses activités ludiques préférées. Il passe d’une activité à une autre sans pouvoir jamais s’y attarder et semble ainsi se lasser rapidement. Conséquemment, il a du mal à s’organiser et ne sait d’ailleurs pas ranger le désordre souvent indescriptible laissé sur son passage et dans sa chambre. Il a des difficultés à suivre les directives et termine rarement une tâche. Il semble ne pas écouter l’entourage et doit être constamment rappeler à l‘ordre.

Impulsivité

Il peut être impulsif et peut présenter une intolérance aux frustrations de la vie quotidienne et peut s’emporter pour la moindre contrariété. Il est impatient et en classe se précipite pour répondre aux questions sans attendre son tour avec des réponses pas toujours exactes parce qu’il n’a pris le temps de la réflexion. Il peut se lancer dans des activités dangereuses et est d’ailleurs plus souvent victime d’accidents. Ces enfants souffrent d’une double peine puisqu’ils sont souvent incompris et malmenés tant que l’on ne révèle pas la maladie et la relation de causalité entre le TROS et leur comportement qui provoque souvent des réactions exaspérées de l’entourage. Ils sont fréquemment punis lorsque les symptômes sont interprétés comme de la mauvaise volonté ou comme un comportement capricieux. Ils ont le sentiment qu’ils le font exprès alors qu’ils ne sont en fait jamais conscients de leur comportement et souffrent alors des réactions vindicatives des parents. Il n’est pas rare qu’il leur soit administré un traitement « calmant ». Ils sont parfois adressés en consultation de psychiatrie lorsqu’ils sont considérés comme des caractériels. Alors qu’il suffit en général de traiter les troubles du sommeil pour qu’en quelques jours, ils normalisent leurs comportements. C’est d’ailleurs un des actes thérapeutiques les plus valorisants de notre pratique : permettre le retour de la sérénité au sein de la famille.

L’hyperactivité se voit surtout avant l’âge de 12-13 ans parce qu’elle est remplacée ensuite par de l’hypersomnolence et de la fatigue. Bien évidemment il existe d’autres causes d’hyperactivité mais il est dommageable que l’on oublie d’éliminer un TROS avant de la prise en charge psychiatrique et la mise sous psychostimulants comme le méthylphénidate voire sous anxiolytiques ou sous antidépresseurs. Les stimulants de la vigilance fonctionnent sur les symptômes comme « hyperactivité » mais ne permettent pas de traiter la maladie causale…qui continue à évoluer. 

 

Symptômes nocturnes 

L’enfant respire fréquemment la bouche ouverte et peut ronfler ou respirer bruyamment. Il n’est pas rare qu’il suce le pouce. Son sommeil est  souvent agité au point de se retrouver dans des positions différentes tout au long de la nuit puisqu’il cherche la meilleure position pour mieux respirer.  Dans les formes sévères, l’enfant peut dormir les fesses en l’air : l’objectif est de dormir la tête en hyperextension afin de tenter d’ouvrir au maximum les voies aériennes. Il peut présenter du bruxisme (grincement de dents), du somnambulisme, des cauchemars voire des crises de paniques. L’enfant peut parler, crier ou pleurer dans son sommeil. Enfin il n’est pas rare qu’il souffre d’énurésies (urination au lit) ou de nycturie (se lève pour aller uriner). Ces symptômes disparaissent en général avec le traitement du TROS. 

TROS à l’adolescence 

À partir de l’adolescence, ils vont commencer à être de plus en plus ralentis intellectuellement et physiquement. Ils vont paraître de plus en plus fatigués et somnolents et vont parfois s’endormir en classe. Lorsque le TROS a débuté dans la petite enfance, on constate qu’ils ont souvent le dos courbé ; ce qui traduit une véritable déformation cyphotique générée par la fatigue chronique.  Ils vont se plaindre de troubles de la mémoire et de la concentration. Ils ont parfois un vocabulaire limité du fait des difficultés d’apprentissage. Il existe fréquemment un état d’anxiété, une irritabilité, des troubles psychoaffectifs voire une dépression aboutissant à l’isolement familial et social. Malheureusement, ces symptômes sont mis sur le compte de la crise d’adolescence. Ce qui retarde d’avantage la prise en charge. Compte tenu d’une certaine popularité des ouvrages sur les « Haut Potentiel », de nombreux parents tendent à rapporter leurs symptômes à ce diagnostic et ce, d’autant que cela valorise l’enfant et les parents. Il semblerait que le TROS puisse stimuler l’intelligence au début parce que l’enfant doit développer des moyens mnémotechniques afin de compenser les troubles de la mémoire et de la concentration qui perturbent l’acquisition des connaissances. L’autisme constitue aussi un diagnostic différentiel. Il est impératif de réévaluer ses enfants une fois que le TROS ait été traité

Conséquences en absence de traitement des TROS de l’enfant 

Non traitée, cette maladie peut avoir des conséquences importantes sur l’état de vigilance, sur les performances intellectuelles, l’équilibre psychique et le devenir scolaire, social et professionnel. Actuellement seule une minorité d’entre eux est diagnostiquée et traitée efficacement. Il faut donc réaliser une étude du sommeil chez un spécialiste des troubles du sommeil de l’enfant qui va confirmer la maladie et proposer le meilleur traitement qui puisse permettre une amélioration rapide. L’analyse du sommeil de l’enfant nécessite une connaissance dans la détection des limitations de débit.  

Prévention des TROS de l’enfant

Tout doit être fait pour prévenir et traiter l’obstruction nasale et la respiration buccale.L’enfant doit pouvoir vivre dans un endroit sain et dépourvu de polluants. L’arrêt du tabagisme passif/tertiaire est impératif. Il faut traiter une rhinite allergique (éviction allergique, lavage nasal et traitement médicamenteux si nécessaire). L’exérèse des végétations et des amygdales peut être envisagées en sachant que l’amélioration du TROS ne peut être que transitoire si persistent les facteurs de risque précités .

Traitement orthodontique

La prise en charge peut faire appel à des traitements orthodontiques spécifiques susceptibles d’améliorer voire de guérir l’enfant. Il existe maintenant des orthodontistes spécialisés en médecine du sommeil. Un des principaux traitements est la disjonction palatine. C’est-à-dire que l’on installe un appareillage pendant plusieurs mois qui écarte le palais et stimule ainsi la croissance du maxillaire supérieur.

Le traitement par Pression Positive Continue (PPC) ( CPAP en anglais)

Chez l’enfant, la CPAP se conçoit transitoirement en attendant que le traitement orthodontique soit pleinement efficace. Et ce, surtout les symptômes sont invalidants, pour démonter aux parents les liens entre le TROS et les troubles comportementaux et cognitifs et pour éventuellement pour le sevrer des médicaments psychotropes. Plus rarement lorsque le traitement orthodontique n’est pas réalisable ou n’est pas suffisamment efficace. A noter qu’au delà de 15 ans, le traitement orthodontique risque d’échouer puisque les deux plaques osseuses qui constituent le palais se soudent l’une à l’autre.

Sous traitement, par PPC ou orthodontique, les symptômes disparaissent comme l’hyperactivité, les troubles de la mémoire et de la concentration ainsi que la plupart des troubles du comportement. 

En conclusion, le TROS est fréquent chez l’enfant. Il est essentiel d’effectuer le diagnostic le plus rapidement possible parce qu’il constitue un handicap physique, intellectuel et émotionnel majeur de l’enfant et de l’adulte qu’il deviendra.